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Kiruna, Maylis de Kerangal

28 Octobre 2019 , Rédigé par Estelle Publié dans #Essais, #Roman

   C'est un trop petit bijou que Maylis de Kerangal nous offre avec Kiruna. Un bijou d'une part car Maylis de Kerangal est mon auteur préférée et ses livres se font rares. Trop petit car Kiruna est effectivement d'un format peu commun et, d'autre part, c'est le sujet, la mine, son histoire, la vie des mineurs qui m'interpelle tout particulièrement. 

   Ce bijou donc, qui fait partie d'un programme intitulé "Mineurs d'un autre monde", est un court roman ou un long article de style journalistique, comme toujours chez Maylis de Kerangal alliant une photographie sociale et humaine d'une grande justesse à un style poétique émouvant. 

    "J'ai cherché une mine comme on cherche un point de passage dans le sous-sol terrestre, un accès aux formes qui le structurent, aux matières qui le composent, aux mouvements qui l'animent, à ce qu'il recèle de trésors et de ténèbres, à ce qu'il suscite comme convoitise et précipite comme invention. Je l'ai cherché comme on cherche la porte de cet espace inconnu sur quoi s'appuient nos existences, espace dont je ne sais s'il est vide ou plein, s'il est creusé d'alvéoles, de grottes ou de galeries, percé de tunnels ou aménagé de bunkers, s'il est habité, s'il est vivant. J'ai voulu descendre dans la mine, passer la tête sous la peau de la planète comme on passe la tête sous la surface de la mer afin d'entrer dans une autre réalité aussi déterminante et invisible que l'est l'intérieur du corps humain. J'ai voulu vivre cette expérience, j'ai voulu l'écrire : je suis partie à Kiruna."

   "Les villes ont des empreintes sonores. Elles ont un rythme, un flow, une tonalité et cette bande-son les distingue, joue comme un moteur d'identification aussi puissant qu'une marque olfactive, aussi immédiat que la vue qu'on en a : on ferme les yeux, on tend l'oreille et l'on sait où l'on est.

   A Kiruna, fin novembre, la rue est feutrée, le vent siffle, et le bruit de mes pas s'étouffe dans la neige. Le froid qui aiguise la ville est le portant sonore de tout ce qui va, de tout ce qui marche, roule, glisse, crisse, de tout ce qui craque, et réverbère le moindre souffle comme un micro géant. Je perçois parfois la vibration de la mine, sourde, qui semble s'intensifier la nuit quand la ville dort, ou bien ce grondement sec quand on dynamite la roche à plus d'un kilomètre dans le fond de la terre. J'écoute." 

http://partageonsnoslectures.over-blog.com/2016/10/maylis-de-kerangal.html

http://partageonsnoslectures.over-blog.com/2016/10/naissance-d-un-pont.html

http://partageonsnoslectures.over-blog.com/2016/11/reparer-les-vivants-maylis-de-kerangal.html

http://partageonsnoslectures.over-blog.com/2016/10/dans-les-rapides-maylis-de-kerangal.html

http://partageonsnoslectures.over-blog.com/2019/12/un-chemin-de-tables-maylis-de-kerangal.html

http://partageonsnoslectures.over-blog.com/2020/08/un-monde-a-portee-de-main-maylis-de-kerangal.html

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M
J’ai toujours sur les rayons de ma bibliothèque « réparer les vivants » que je n’ai toujours pas lu. Il faut vraiment que je me penche vers cette auteure... Merci de ce rappel.
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