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Vivre, à quoi ça sert ? , Soeur Emmanuelle

18 Août 2020 , Rédigé par Josée Publié dans #Essais

   Voici un récit très personnel de Soeur Emmanuelle. Elle nous raconte sa jeunesse, son cheminement dans la foi, ses questionnements, ses doutes, et l'aide qu'elle a trouvée auprès de son maître à penser, Blaise Pascal. Elle nous met aussi en garde contre ce qu'elle appelle les "trois registres de la libido : la pulsion de sentir, la pulsion de savoir, la pulsion de dominer." et nous donne des exemples des expériences qu'elle en a fait. Elle nous incite - et nous explique comment elle est arrivée - à s'accepter "de n'être qu'humain, fini" pour briser le "cercle infernal [...] du perfectionnisme, [..] de la course aux résultats, à efficacité" et aller vers "l'action équilibrée, sereine, qui a renoncé à l'idéalité".    

   Les Pensées, son livre de référence, ont accompagné Soeur Emmanuelle toute sa vie. 

   Vivre, à quoi ça sert est donc une belle manière d'aborder Les Pensées, un décryptage d'une grande intelligence de coeur de la très dynamique et positive Soeur Emmanuelle, qui, au passage, nous explique le "fameux pari de Pascal". 

   Vivre bien sûr vous l'aurez deviné sert à aimer et uniquement à aimer en acceptant sa condition humaine.   "Dans l'élan du coeur, dans le moindre mouvement d'amour, s'épanouit la vérité de l'homme."

"Contrairement à l'image d'Epinal qui est donnée du fameux "pari" de Pascal, il ne consiste pas vraiment dans la considération des gains et des pertes, encore moins dans une délibération hypocrite, du genre : "Si Dieu existe, j'ai tout gagné en pariant ; s'il n'existe pas, je n'ai rien perdu." Le pari est interne à la foi. Il est ce passage, cette conversation entre la foi raisonnée qui comprend qu'elle ne peut pas comprendre Dieu et la foi raisonnée qui comprend qu'elle ne peut même pas déterminer s'il est ou n'est pas. La raison est impuissante à saisir et à démontrer cette certitude autrement profonde qu'apporte l'expérience de la foi. Pourtant, la raison peut fort bien - et c'est ce qu'illustre Pascal - décrire son impuissance et l'expliquer. La raison expose alors sa perte de maîtrise. La raison sait que l'expérience véritablement humaine dépasse ses moyens et son ordre. Autrement dit, croire n'implique en aucune manière de "perdre la raison" ou de s'opposer à elle. C'est bien un acte de raison de se rendre compte de son impuissance. La foi est au-dessus de la raison et non pas contre. Le pari est un pari raisonnable mais qui n'est pas le fruit de la raison".

"Je fus comme abasourdie. Depuis si longtemps je me débattais pour trouver des preuves irréfutables de l'existence de dieu, et voilà que Pascal se moquait de l'ambition illusoire de la rationalité en ce domaine ! Dieu est en effet irréductible à la raison raisonnante. Pascal ne cesse de le répéter : Dieu est un Dieu caché. N'est-ce pas d'abord l'expérience que nous faisons quotidiennement ? Dieu est absent de ce monde qui tourne mal, de ce monde violent et injuste. Et pourtant, il y a bien une présence de Dieu dans le monde, mais ce n'est pas sous le mode de l'intervention. Cette présence est au coeur de l'homme, de sa conscience et de sa volonté, de son inconscient et de son âme, pour le porter vers le bien, qu'il le sache ou non. Dieu a confié le monde à la responsabilité de l'homme, créé à son image et à sa ressemblance. Aussi, Dieu n'agit dans le monde que dans et par l'homme. Pour autant nous ne sommes pas des robots. Nous sommes libres, ou plutôt nous possédons des germes de liberté. Que Dieu soit un Dieu caché est la condition même de notre liberté : si un Dieu s'imposait à nous, qu'en serait-il de notre libre arbitre ? Il n'y aurait même plus besoin de croire, puisque ce dieu serait évident. La foi est un acte libre." 

(Pascal Pensées) " "Dieu sensible au coeur et non à la raison". Ce fut une libération, l'irradiation d'un phare illuminant ma nuit. Il suffisait de laisser jaillir ma soif d'absolu, il suffisait d'aller vers Dieu comme j'allais vers l'homme dans une simple confiance, sans recherche de preuves rationnelles. "

   "je pus ouvrir largement mon coeur, mon coeur assoiffé, pour y laisser entrer l'infini. Et cet infini n'a aucun rapport avec les immenses perspectives de l'esprit. Cet infini est de l'ordre de l'amour. Dieu n'est pas seulement un Dieu caché, il est aussi et d'abord un Dieu d'amour. Quelle consolation ! Avec le pari de Pascal, je fus ramenée à moi-même, à mon identité. Je fus rajeunie. Je retrouvais mon coeur d'enfant, simple comme une source. (Pensées "La sagesse nous renvoie à l'enfance.")"   

   "L'acte pur, le don gratuit à 100%, existe-t-il ? La réponse est non. Notre nature cherche son épanouissement. Elle contient en elle-même la soif de jouir et de posséder, de "se faire mousser", comme elle contient aussi l'élan du don, du service, de la compassion." [...] L'idéal, me semble-t-il, est de travailler dans le même mouvement à son propre bonheur et à celui des autres. Ne te creuse pas trop la tête, Emmanuelle, essaie de t'oublier davantage en cessant d'être obnubilée par tes propres contradictions. Essaie de t'accepter; humaine, pétrie de grandeur et de misère. Reçois-toi telle que tu es, tout bonnement, en tirant la meilleur part de tes défauts comme de tes qualités. Et yalla, en avant pour le service !"

    "Il m'a fallu des années pour me rendre compte que je portais en moi, dans ma peau, dans mon corps, mon coeur, mon âme, un noyau inextricable de bon et de mauvais."

    "Le champ de l'amour, s'il est infini, dépend de chaque personne, de sa capacité d'ouverture, de ses décisions. Chacun a une vocation d'amour particulière. L'amour n'est pas uniforme, chacun l'incarne à sa manière., dans les conditions déterminées de sa vie personnelle. Ainsi, la vie n'est pas un sens unique., général et valable pour tout le monde. Il n'y a pas de recette. L'amour est un pari personnel. L'amour est multiforme. L'amour est le fruit de notre liberté. Entre le plaisir et le bonheur, il faut choisir. Entre l'écume et l'éternité, il faut choisir. Entre la voracité et l'amitié, il faut choisir.  Attention ! Il ne s'agit pas d'un choix radical et définitif, mais plutôt d'une direction. De quel côté pencherons-nous ?"     

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